Edouard Faure, responsable de la gestion crédit chez Swiss Life Asset Managers, estime auprès de Reuters que la Banque centrale européenne (BCE) fera une pause dans les baisses de ses taux directeurs cet été et que les projets d'investissements dans le bloc soutiendront la croissance et empêcheront l'inflation de tomber sous l'objectif de 2%.
L'institution de Francfort a procédé jeudi à une nouvelle baisse du loyer de l'argent, la huitième depuis juin 2024, ramenant le taux de dépôt à 2,0%, contre un sommet à 4,0%.
1./Que retenez-vous des annonces de la BCE alors que la baisse des taux était largement anticipée par les marchés ?
Ce que je retiens des annonces, c'est que la croissance du produit intérieur brut (PIB) en zone n'a pas été révisée. Elle reste inchangée pour l'année 2025 et, même si elle est relativement basse, elle reste positive. Cela veut dire, visiblement, qu'il n'y a pas de crainte à court terme de la part de la BCE que la croissance en Europe soit impactée davantage, en particulier par les récentes annonces sur les droits de douane.
Le deuxième point à retenir c'est la révision de l'inflation, avec une inflation qui va se stabiliser à 2% en 2025, qui va baisser en dessous de 2% en 2026 et qui va revenir à 2% en 2027. Donc on semble arriver dans une zone où l'inflation devrait rester autour de 2% pour cette année et les deux prochaines années.
Ce sont ces deux éléments qui font dire à la BCE qu'elle est bien positionnée pour faire face aux incertitudes actuelles. C'est un premier signal fort de la part de la BCE qui montre qu'on arrive aujourd'hui à une fin de cycle sur les baisses de taux. Tout a l'air de pointer pour une pause dans la baisse des taux pour le mois de juillet, si on regarde les éléments de langage.
2./L'hypothèse d'une spirale déflationniste en zone euro vous semble-t-elle crédible avec notamment l'affermissement de l'euro qui réduit le coût des importations libellées en dollar, dont les prix de l'énergie ?
C'est difficile à dire. Je note cependant que malgré les risques géopolitiques et ceux induits par les droits de douane américains, la zone euro est celle qui continue d'avoir le moins d'inflation tout en bénéficiant d'une certaine croissance. Les investissements annoncés dans la défense et les infrastructures vont en outre permettre à l'inflation de ne pas baisser, voire de légèrement réaugmenter, tout en restant dans une zone autour de 2%.
L'évolution de l'euro-dollar dépendra évidemment de l'évolution du dossier sur les droits de douane entre les États-Unis et l'Europe, d'une part, et d'autre part les États-Unis et la Chine. Notre scénario de base est que les États-Unis devraient trouver un accord sur les droits de douane avec la plupart des pays. Ces droits de douane vont être plus élevés que ce qu'ils étaient avant le retour de Donald Trump au pouvoir, ce qui aura un effet sur l'euro, mais cet effet ne devrait pas être massif, voire temporaire.
3./ A quoi peut-on s'attendre lors des futures réunions de la BCE alors que des banques centrales comme la Banque nationale suisse (BNS) envisagent de revenir à l'ère des taux d'intérêt négatifs ?
Le seul point qui pourrait faire que les taux reviennent en territoire négatif en zone euro, ce serait un choc important, comme le COVID-19, une crise financière et des problèmes des dettes souveraines. Donc il faudrait un choc fort exogène, qui nécessite de relancer la machine économique, de dégripper le système.
Nous tablons sur un taux terminal de dépôt autour de 1,50%, ce qui correspondrait plus ou moins au taux neutre. Cela va se traduire par une baisse des rendements obligataires. Pour aller chercher un rendement un peu plus attractif, il va falloir soit prendre un peu plus de risques en termes d'émetteurs, donc aller chercher des émetteurs dans des sociétés qui sont un peu plus risquées, ou bien allonger un peu la duration de ses investissements pour pouvoir aller chercher un supplément de rémunération et garder une rémunération attractive par rapport à aujourd'hui.
(Propos recueillis par Claude Chendjou, édité par Zhifan Liu)
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